Robe en wax, blazer en wax, turban en wax… Le wax est au centre de la mode africaine depuis des siècles. Ce tissu aux motifs chatoyants s’est en quelque sorte imposé comme l’emblème du continent africain. Force est de constater qu’il orne la majorité des vêtements, mobiliers ou événements qui revendiquent une inspiration africaine. Cette association du wax à l’Afrique n’est pas un hasard. Les plus grands marchés de consommateurs de wax sont bien les pays d’Afrique de l’Ouest. Il y est arboré fièrement, toutes classes sociales confondues. Cependant, comme l’explique Youssouf Fofana, le cofondateur de Maison Château Rouge : « le tissu wax est le tissu le moins africain. »
Histoire du wax
Comme vous le savez, le wax est du tissu en coton dont les motifs sont imprimés au moyen de la cire (le wax). Or, cette technique est celle du batik javanais que les explorateurs anglais et hollandais apprennent en Indonésie pendant la période coloniale. Les Européens, suivis par les Chinois, vendent par la suite le tissu wax aux Africains. Le succès est immédiat. Alors si certains pays africains en produisent timidement, le wax n’a d’africain quasi que ceux qui l’achètent. Cependant, il existe au contraire de nombreux autres tissus africains, plus endroit de revendiquer cette appellation, précisément dans les pays où le wax domine. Il y en a justement six qui font de plus en plus parler d’eux.
Les tissus africains qui concurrencent le wax.
1. Le bazin
Le bazin est pour de nombreux Africains, ce que le costume cravate est aux Occidentaux. Porté lors des occasions spéciales, il n’est pas rare de voir des célébrités ou des chefs d’État arborer un long boubou en bazin coloré et au col brodé. Néanmoins, tout comme le wax, ce tissu ne peut pas tout à fait se revendiquer africain. Le mot bazin vient de l’expression « ouate de coton » en italien, « bambagia. » Ce tissu en coton blanc damassé est utilisé pour décorer les intérieurs européens à partir de la fin du XVIIIème siècle. C’est dans l’un d’eux qu’un commerçant malien le découvre en Allemagne. Il a alors l’idée d’exporter ce tissu dans son pays. Il le fait au préalable teinter et tremper dans de la gomme arabique pour le rendre plus brillant et raide. Ainsi, si le tissu est toujours importé d’Europe ou de Chine, sa teinture artisanale est effectuée au Mali, devenu spécialiste du domaine.
2. Le Bogolan
Si le récent intérêt de la diaspora africaine pour l’Afrique a conduit au départ à une frénésie pour le wax, il les amène désormais à s’intéresser à d’autres tissus dits vraiment africains. Par-là, ces consommateurs conscients entendent surtout acheter des tissus africains qui profitent à l’économie du continent. Parmi ces tissus, le bogolan figure en tête au point de disputer au wax sa place sur les podiums. Comme ce dernier, il s’accorde aux représentations associées à l’Afrique. Ce tissu se décline en effet en teintes marron, beige, jaune ou noir, avec des motifs aux formes diverses. Seulement cette fois-ci, les clichés ne se trompent pas. Le bogolan est originaire du Mali. Il est composé de coton tissé par des hommes et teinté à partir de la terre par des femmes. L’étoffe doit d’ailleurs son appellation à son mode de fabrication. En bambara, bogolan désigne « fait avec de la terre. »
3. Le pagne Indigo ou Lépi
Souvent confondu avec les pagnes en wax ou bazin, le pagne indigo ou lépi a un aspect similaire. C’est une étoffe en coton léger qui se noue lui aussi en pagne. Il se distingue cependant de ces autres tissus parce qu’il a la particularité de n’exister qu’en une seule teinte. Ce tissu doit d’ailleurs son nom à sa couleur obtenue à partir de l’indigo et à ses rayures blanches appelées « lépi. » Le pagne indigo est obtenu par une technique de tissage de coton teinté avec des plantes et des écorces végétales. Il est fabriqué traditionnellement par les Peuls dans une région de la Guinée Conakry. Le lépi est alors réservé aux occasions spéciales comme les mariages. Désormais il est produit et commercialisé bien au-delà des plaines guinéennes, au Bénin ou au Mali. Il se retrouve décliné aussi bien en oreillers qu’en robe. Les couturiers n’hésitent d’ailleurs plus à revisiter ses emblématiques rayures blanches.
Les tissus africains qui changent du wax
1. Le calicot
Avant d’être des robes tye and dye que les touristes s’arrachent au Sénégal, le calicot désigne toutes les étoffes de coton importées d’Asie par les Anglais. Le tissu serait appelé ainsi en référence à la ville de Calcutta où se trouvait à l’époque un comptoir de vente de marchandises. Sa solidité alliée à sa souplesse, fait du calicot un tissu prisé qui se prête à toutes les fantaisies. Il intègre au XIXème la composition de nombreux vêtements, au point de désigner en France les vendeurs de tissus bon marché. Dans l’ouest de l’Afrique, le calicot est teinté soit à la main, soit par la technique du batik. Toutefois ce calicot teinté est agrémenté de motifs décolorés ou de dégradés de couleurs. Le résultat est un tissu aux tracés vaporeux. Il sert le plus souvent à fabriquer des robes et autres tenus d’été, plus légères à porter sous le soleil qu’un boubou.
5. Le kenté
Le kenté, qu’on retrouve au Ghana et en Côte d’Ivoire sous le nom de kita, est souvent qualifié de royal. En effet, il est pendant longtemps l’apanage exclusif des rois de l’ancien royaume Ashanti. Pourtant, il signifie très humblement en langue akhan « panier » ou « tissu tissé. » Il est produit par un procédé appelé « tissage en bandes ». Il s’agit de croiser une rangée de fils verticaux avec une autre rangée de fils horizontaux sur un métier à bandes étroites. Les bandes de coton et de soie obtenues sont ensuite cousues bout à bout. Malgré le caractère commun de cette technique de tissage en Afrique, le kenté est un tissu atypique du continent.
L’étoffe se caractérise par de petites figures géométriques qui sont sa marque de fabrique. Ces formes renvoient d’ailleurs à des proverbes locaux. De plus, le kenté se décline uniquement en blanc et noir à l’origine. De nos jours toutefois sa palette de couleurs s’est élargie.
6. Le Rabal
Sans avoir rien à envier à leurs cousins Akhan, les Manjacks du Sénégal, de la Gambie et de Guinée-Bissau peuvent aussi se vanter de leur maîtrise du tissage. Ils confectionnent en effet le rabal depuis si longtemps, que son invention est attribuée à un esprit. Le rabal est un tissu composé principalement de coton ou de soie. L’étoffe est tissée de manière artisanale sur des métiers à tisser en bois. Bien qu’il soit le plus souvent uni, le rabal est loin d’être sobre avec ses couleurs vives et son tissu brillant. De plus, il est également rehaussé de symboles aux lignes droites et épurées. Ces dernières varient en fonction de l’occasion pour laquelle le tissu a été fabriqué. Considéré comme précieux, le rabal était offert lors des mariages et des naissances afin d’apporter la fécondité.
Une liste encore longue de tissus africains…
Ces quelques tissus africains et plus précisément de l’Afrique de l’Ouest ne sont qu’une infime partie de la variété présente sur l’ensemble du continent. Certains sont issus d’un savoir-faire ancestral. D’autres, le fruit d’échanges avec d’autres peuples ou d’une appropriation d’un tissu étranger. Mais ils prouvent chacun à leurs manières que l’Afrique a beaucoup plus à offrir que le wax.
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